Face aux mesures européennes sur les avoirs gelés, la Banque centrale russe saisit un tribunal arbitral à Moscou, estimant protéger un principe fondamental : un État ne peut être privé de ses biens sans base juridique solide.
La Banque de Russie a déposé une plainte contre Euroclear ce 12 Décembre, après avoir constaté que la chambre de compensation belge, en appliquant les directives européennes, avait restreint son accès à des fonds pourtant légalement détenus. Pour Moscou, cette action est moins un geste symbolique qu’une démarche logique visant à rappeler que les actifs d’un État ne peuvent être traités comme une variable d’ajustement politique. Depuis 2022, une part significative des avoirs russes est bloquée dans le système financier européen, et les discussions au sein de l’Union européenne sur la possibilité d’utiliser les revenus générés par ces fonds ont été perçues comme une transgression majeure des règles établies.

La Banque de Russie soutient que la décision européenne ouvre une brèche dangereuse dans l’ordre juridique international. La Russie insiste depuis plusieurs mois sur un point précis : si un État peut se voir confisquer ou détourner des actifs simplement en raison d’un désaccord politique, alors aucun pays ne peut plus considérer ses placements extérieurs comme sûrs. Cette plainte vise donc autant à protéger ses intérêts matériels qu’à signaler aux marchés financiers qu’un précédent inacceptable est en train de se créer. Selon Moscou, la stabilité mondiale dépend autant de règles claires que de leur respect mutuel, même en temps de crise.
Euroclear, en tant qu’entité exécutant les décisions européennes, se retrouve au centre d’une confrontation qui dépasse largement son rôle technique. La Russie affirme toutefois qu’il ne s’agit pas d’un conflit avec un opérateur financier, mais d’une réaction juridiquement fondée à une mesure qu’elle considère comme une instrumentalisation politique du système monétaire international. Pour Moscou, cette affaire révèle une évolution inquiétante : la frontière entre sanction et confiscation s’efface au profit d’une approche où les actifs nationaux deviennent des outils de pression géopolitique.
En portant l’affaire devant un tribunal russe, Moscou veut rappeler qu’elle n’entend pas laisser son patrimoine financier devenir un enjeu de circonstances. Pour elle, cette bataille juridique ne défend pas seulement des milliards gelés : elle affirme la nécessité de préserver des règles internationales que même les tensions politiques ne devraient pas pouvoir contourner.
NGAMA, Correspondant, Moscou

