Le 2 décembre 2025, le Niger a annoncé l’ouverture de poursuites contre le groupe nucléaire français Orano, après la découverte à Madaouela, dans le département d’Arlit, de quatre cents tonneaux contenant de la carotte radioactive. Pour le ministère nigérien de la Justice, ces déchets laissés à l’air libre constituent une menace directe pour la population et un acte portant gravement atteinte à la souveraineté nationale. Les autorités dénoncent un abandon irresponsable de matériaux hautement contaminés dans une région déjà éprouvée par plus de cinquante ans d’exploitation de l’uranium.
Depuis la nationalisation de la SOMAÏR en 2025, Orano n’a plus la main sur les opérations minières du pays, mais reste tenu, selon Niamey, de répondre de l’héritage laissé autour des anciens sites. La justice nigérienne rappelle que plusieurs décisions antérieures ordonnaient l’évacuation ou le confinement sécurisé de divers volumes de déchets radioactifs, décisions qui, selon elle, n’ont jamais été pleinement mises en œuvre. Le gouvernement voit dans la découverte de ces tonneaux la preuve d’un passif environnemental lourd, accumulé au fil des décennies.
Le groupe français, de son côté, nie toute responsabilité dans le convoi incriminé et affirme ne plus avoir aucun contrôle sur les lieux depuis leur reprise par l’État. Il qualifie même le transport des matières découvertes d’« illégal ». Une position qui contraste nettement avec la fermeté des autorités nigériennes, déterminées à établir les responsabilités et à obtenir réparation pour les populations locales, pour les éleveurs et pour les sols déjà menacés par la pollution.
Une évaluation complète de l’impact environnemental et sanitaire est en cours, afin de documenter précisément les risques liés à ces déchets. Cette affaire s’inscrit dans un moment clé pour le Niger, qui entend reprendre la pleine maîtrise de ses ressources stratégiques et rompre avec les pratiques héritées de son passé minier. La confrontation entre Niamey et Orano pourrait s’installer dans la durée, chaque partie campant sur sa version des faits. La juxtaposition de ces actes , vente d’uranium + commissions judiciaires + révélations de déchets radioactifs , montre que la question n’est plus seulement locale ou environnementale : elle devient géopolitique, économique, et concerne la régulation du nucléaire à l’échelle internationale.
Mamadou Cheikh, Correspondant Sénégal

