

Vous ne franchirez pas la frontière des Etats-Unis pour un diplôme si vos idées franchissent la ligne rouge. La suspension brutale des visas étudiants par les États-Unis, annoncée ce 27 mai comme une “pause technique pour vérification des réseaux sociaux”, cache en réalité une opération beaucoup plus stratégique : reprendre le contrôle idéologique des campus.
Le vrai mobile : prévenir “l’infiltration idéologique”
Selon plusieurs sources diplomatiques, l’objectif de cette suspension n’est pas simplement sécuritaire. Il est préventif, idéologique et symbolique. Depuis l’automne 2024, les universités américaines ont vu se multiplier les mouvements étudiants contestant la politique étrangère américaine, notamment vis-à-vis du Moyen-Orient. Or, une part significative de ces voix dissidentes venait… d’étudiants internationaux.
L’administration a donc décidé de frapper à la source : les entrées.
“Nous avons laissé entrer des gens qui nous détestaient”, aurait confié un conseiller du Département d’État, reprenant une rhétorique déjà utilisée par Trump en 2017.
Un mobile algorithmique : surveiller les esprits, pas les passeports
Les nouvelles technologies ont changé la donne. Grâce à des algorithmes de surveillance prédictive, le Département d’État affirme pouvoir détecter “les profils à risque” avant qu’ils ne posent le pied sur le territoire. Mais ces profils ne sont pas des terroristes : ce sont des internautes.
Un étudiant indien qui partage une vidéo d’Amnesty International.
Une étudiante tunisienne qui tweete un extrait d’un discours de Malcolm X.
Un futur doctorant nigérian qui like un post pro-BDS.
Ces gestes numériques peuvent suffire à bloquer un visa.
Le mobile devient alors clair : modeler l’immigration intellectuelle selon des critères émotionnels et politiques.
Universités sous pression : entre dollars et diplomatie
Les institutions universitaires américaines sont coincées entre deux feux : d’un côté, leur survie financière dépend des frais de scolarité des étrangers ; de l’autre, elles subissent la pression croissante de l’État fédéral à “filtrer idéologiquement” leurs recrues.
“On nous demande de jouer les douaniers mentaux. Ce n’est plus de l’admission, c’est de l’alignement.”
– Administrateur anonyme d’une université Ivy League.
Les États-Unis ne ferment pas la porte aux étudiants étrangers. Ils ferment l’accès aux idées qui les dérangent, et utilisent pour cela ce que les étudiants utilisent le plus : leurs propres téléphones.
NGAMA
Correspondant, Moscou

