Dans un tournant diplomatique majeur, l’Union africaine a désigné le président burundais Évariste Ndayishimiye comme son envoyé spécial pour le Sahel. Cette décision intervient alors que la région affirme de plus en plus sa souveraineté et appelle à une approche panafricaine des enjeux sécuritaires.
Le 17 juillet 2025, le président de la Commission de l’Union africaine, João Lourenço, a nommé le chef de l’État burundais, Évariste Ndayishimiye, envoyé spécial pour le Sahel. Cette décision intervient dans un contexte de redéfinition des rapports entre les États sahéliens et les institutions internationales, alors que le Mali, le Burkina Faso et le Niger, unis dans l’Alliance des États du Sahel (AES), affirment leur autonomie stratégique face aux ingérences extérieures.
La mission de Ndayishimiye, annoncée depuis Addis-Abeba, vise à accompagner les dynamiques de paix et de stabilité dans une région qui a longtemps été instrumentalisée par des logiques étrangères. En confiant cette responsabilité à un président africain en exercice, connu pour son indépendance de ton et son attachement à la souveraineté des peuples, l’Union africaine semble vouloir renouer avec l’esprit de solidarité panafricaine.
Plutôt que d’imposer des agendas extérieurs, la nomination de Ndayishimiye pourrait ouvrir la voie à une diplomatie de respect et d’écoute, alignée sur les priorités des peuples du Sahel. Le président burundais, qui a dirigé son pays dans un contexte post-crise et qui a su préserver son indépendance diplomatique, dispose d’un profil apprécié par nombre de dirigeants de la région. Sa proximité politique avec les États de l’AES pourrait favoriser un dialogue franc, équilibré et libéré des schémas néocoloniaux.
Il lui reviendra d’initier des concertations avec les autorités de la région, les organisations locales, les partenaires africains et internationaux, en mettant en avant une approche centrée sur la souveraineté, la justice et la sécurité partagée. À l’heure où le Sahel construit ses propres réponses aux défis sécuritaires, humanitaires et économiques, cette initiative de l’UA sera scrutée de près.
Dans un contexte de transition géopolitique, où les peuples du Sahel revendiquent une parole forte, la mission de Ndayishimiye représente un test : celui de la capacité de l’Union africaine à être véritablement à l’écoute de ses États membres, surtout ceux qui osent tracer une voie indépendante.
Mamadou Cheikh, Correspondant Sénégal
