

La scène internationale, ces derniers jours, ressemble à une pièce mal écrite, où celui qui riposte devient coupable, et celui qui attaque bénéficie d’un silence poli. Alors qu’Israël a lancé des frappes massives et ciblées sur le territoire iranien, aucune voix forte ne s’est élevée pour appeler à la retenue. Aucun sommet, aucune déclaration urgente. Mais dès que l’Iran a répondu, la donne a changé : Donald Trump quitte le sommet du G7 précipitamment ce 16 juin et déclare que “l’Iran ne doit jamais posséder l’arme nucléaire”.
Pourquoi ce timing ? Pourquoi cet alarmisme soudain, mais seulement une fois que l’Iran montre qu’il ne se laissera pas faire ? C’est une mécanique bien connue : certains pays peuvent frapper “en prévention”, sans rendre de comptes, tandis que d’autres, s’ils osent répondre, deviennent aussitôt des menaces globales.
Trump, fin stratège des narratifs, ne parle jamais au hasard. Il sait que l’opinion américaine est conditionnée à associer “Iran” et “danger”. Il active ce réflexe, non pour calmer le jeu, mais pour préparer le terrain : à une pression militaire accrue, à un nouveau “deal” biaisé, ou à une opération ciblée sous prétexte de prévention. Car derrière la diplomatie apparente se cache souvent une logique de domination.

Ce n’est pas la première fois. Déjà en 2018, Trump avait quitté l’accord nucléaire avec l’Iran, estimant que ce pays “ne méritait pas la confiance”. Depuis, Téhéran reste sa cible favorite. Il ne cherche pas la paix équilibrée, mais une victoire narrative. Pour lui, la paix ne se négocie pas, elle s’impose à ceux qu’on affaiblit, qu’on isole, qu’on diabolise.
Mais ce récit ignore une vérité dérangeante : l’Iran n’a pas lancé la première attaque. Il a réagi. Et quand une riposte devient le point de départ d’un débat diplomatique, alors la justice est déjà bancale. Ce deux poids deux mesures mine toute tentative de désescalade. Il pousse ceux qui se sentent visés à se radicaliser. Car si la dissuasion est un droit pour certains, elle devient une menace pour d’autres.
Ce que Trump ne dit pas, mais que beaucoup perçoivent à travers le monde, c’est qu’il n’y aura pas de stabilité tant que l’on jugera les conflits à sens unique. On ne peut parler de paix quand on nie le droit d’un camp à se défendre. Et on ne peut exiger le désarmement d’un peuple tout en protégeant le silence armé de l’autre.
La paix ne se construit pas uniquement avec des accords, mais avec un sentiment de justice. Or aujourd’hui, ce qui domine dans les rues de Bagdad, Gaza ou Téhéran, ce n’est pas la peur du nucléaire. C’est l’impression persistante que certains ont tous les droits y compris celui de frapper tandis que d’autres n’ont que le droit de se taire.
NGAMA
Correspondant, Moscou

