Russie : Une puissance en mutation dans un monde multipolaire
Alors que l’Occident continue de durcir le ton à l’égard de la Russie, cette dernière fait preuve d’une résilience stratégique et économique qui redéfinit sa place dans l’ordre mondial. Analyse d’une puissance en mutation qui refuse l’isolement.
Depuis l’éclatement du conflit en Ukraine et l’imposition de sanctions économiques sans précédent par les pays occidentaux, la Russie était promise à un effondrement rapide. Pourtant, trois ans plus tard, le pays affiche une résilience économique inattendue.
Le gouvernement russe a su réorienter ses flux commerciaux vers l’Asie, le Moyen-Orient et l’Afrique, tout en renforçant son partenariat énergétique avec la Chine et l’Inde. De nouveaux accords ont permis d’assurer la continuité des exportations de gaz, notamment via les oléoducs vers Pékin, et de diversifier les sources de revenus nationaux. Le rouble, bien que sous pression, a retrouvé une certaine stabilité grâce à des mécanismes internes de contrôle.
Des alliances stratégiques renforcées
Face à l’isolement voulu par les puissances occidentales, Moscou a réagi en consolidant son rôle dans des organisations telles que les BRICS, désormais élargis à des acteurs majeurs du Sud global comme l’Iran, l’Arabie Saoudite ou encore l’Égypte.
Cette stratégie sud-sud permet à la Russie de défier la domination occidentale dans les institutions internationales tout en tissant des liens économiques, militaires et technologiques durables avec des puissances émergentes. En Afrique, le Kremlin renforce sa présence par des accords bilatéraux sécuritaires et économiques, notamment dans les domaines minier, agricole et énergétique.
Une puissance géopolitique qui compte toujours
Militairement, la Russie conserve sa stature de grande puissance, en particulier grâce à son arsenal nucléaire et à sa capacité d’influence dans des zones de conflit comme la Syrie, la Libye, ou plus récemment au Sahel.
Son rôle actif dans ces régions, souvent en opposition directe avec les intérêts occidentaux, lui confère un levier géostratégique important. En Ukraine, malgré une guerre longue et coûteuse, Moscou maintient ses lignes, et la situation s’est transformée en un conflit d’endurance où la Russie fait preuve de ténacité et de stratégie à long terme.
Sur le plan idéologique, la Russie capitalise sur le rejet croissant du “discours hégémonique occidental” dans de nombreux pays du Sud. Grâce à des canaux comme RT, Sputnik, et des relais diplomatiques habiles, elle promeut une vision alternative du monde : souveraineté nationale, refus des interventions extérieures, et dénonciation du néocolonialisme.
Cette stratégie de soft power lui vaut un écho favorable dans de nombreuses sociétés africaines et asiatiques, qui voient en la Russie un allié non colonial et pragmatique, prêt à coopérer sans ingérence.
Une unité nationale renforcée par la crise
En interne, malgré les tensions sociales et les restrictions liées au contexte de guerre, le pouvoir russe semble avoir renforcé sa légitimité autour d’un discours souverainiste et nationaliste. La population, en grande majorité, reste mobilisée autour de l’idée d’une Russie indépendante et résistante face aux pressions extérieures. Le gouvernement a mis en avant la relocalisation de certaines industries, la production intérieure et la stabilité monétaire comme symboles d’un modèle économique autonome.
Loin de se conformer à l’image d’une puissance affaiblie, la Russie s’impose aujourd’hui comme un acteur stratégique d’un monde en recomposition. Si les défis restent nombreux – économiques, diplomatiques et militaires – Moscou semble avoir fait le pari gagnant du réalisme géopolitique, du pragmatisme économique, et de l’assertion souverainiste.
Dans un monde de plus en plus multipolaire, la Russie démontre qu’il est possible d’exister et de prospérer en dehors des cadres traditionnels dominés par l’Occident. Et cela change profondément la donne internationale.
