

George Elombi, haut cadre camerounais et juriste chevronné, prend les rênes d’Afreximbank à un moment clé pour le développement économique du continent. Sa nomination, saluée pour sa légitimité et son parcours au sein de la banque, renforce la place de l’Afrique centrale dans les grandes institutions financières africaines. Un nouveau chapitre s’ouvre pour la diplomatie économique du Cameroun.

1. Qui est Dr George Elombi ?
Dr George Elombi est un haut cadre camerounais de l’Afreximbank, nommé très récemment Président & CEO. Juriste de formation, il est titulaire d’un LL.M. et d’un doctorat en arbitrage commercial de la London School of Economics, après un début d’études à l’Université de Yaoundé en 1989. Entré à Afreximbank en 1996, il a gravi tous les échelons : de juriste principal à vice-président exécutif chargé de la gouvernance, des services juridiques et de la gestion d’entreprise.
2.Contexte économique & diplomatique
A. Un leader régional porté au sommet
• La montée d’un Camerounais à la tête de cette institution renforce l’influence de l’Afrique centrale au sein d’un acteur clé du financement du commerce intra-africain.
• Sa désignation répond à un processus transparent : appel à candidatures global, évaluation par un cabinet international, recommandé par le conseil et approuvé par les actionnaires.
B. Enjeux de transformation
• Elombi vise à faire d’Afreximbank un moteur d’industrialisation en Afrique, avec un objectif ambitieux : porter l’actif à 250 milliards $ sur dix ans.
• Priorités annoncées : modernisation des infrastructures (routes, ports, centrales), consolidation des capacités humaines et mobilisation du potentiel minier.
• Cette trajectoire doit s’inscrire dans la continuité post-AfCFTA, en renforçant l’intégration régionale et la compétitivité sur les marchés mondiaux.
3. Actionnariat : influence et responsabilités
Tableau des classes d’actionnaires
Afreximbank compte 53 États africains et divers investisseurs, répartis en quatre classes :
CLASSE D’ACTIONNAIRES | CATEGORIE D’ACTIONNAIRES | EXEMPLES |
Classe A | États africains, banques centrales africaines, institutions continentales | BAD ( Banque Africaine de Developpement) détiennent plus de 50 % des parts. |
Classe B | institutions financières africaines et investisseurs privés. | Dangote Group (Nigeria) et Aenergy (Angola) |
Classe C | investisseurs non africains(banques,agences publiques) | Standard Chartered, HSBC, Citibank, China Exim Bank, Exim India |
Classe D | investisseurs publics ou privés ( librement transférables) | cotés via des instruments à la Bourse de Maurice depuis 2012 |
Poids et dynamiques
• Les États détiennent la majorité, garantissant une orientation publique et légitimant la stratégie de l’institution.
• La présence d’investisseurs privés (Dangote, Aenergy) et étrangers (banques internationales, Exim Bank) montre un modèle hybride : inclusion du capital commercial pour soutenir ses missions de développement.
• Depuis 2012, Afreximbank a levé des fonds publics et privés (ex. US $ 500 millions approuvés en capitalisation en 2024), permettant une hausse de capacité de crédit et de syndication
Tensions et enjeux
• Fitch a récemment abaissé la note de la banque (à BBB-, avec perspective négative), soulignant la criticité de son modèle : des prêts auprès d’États aux conditions plus commerciales (taux élevés) pourraient la soumettre à des restructurations de dette .
• Ce positionnement hybride ,rôle de multilatéral classique et acteur de crise financière est source de débats sur le statut de créancier préféré (Preferred Creditor Status), que la banque revendique ; mais certains États débiteurs (Ghana, Malawi, Zambie) contestent ce statut .
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4. Enjeux pour l’Afrique centrale et le Cameroun
Pour le Cameroun
• Avoir un Camerounais à la tête contribue à accroître l’exposition internationale et la légitimité du pays dans les hautes sphères.
• Une telle position stratégique peut faciliter les approbations de financements de projets nationaux : infrastructures, énergie, zones industrielles.
• Elle canalise aussi des lignes de crédit privilégiées pour des projets locaux, ce qui pourrait renforcer la diplomatie économique de Yaoundé.
Pour l’Afrique centrale
• Elombi connaît très bien cette région : son orientation à la tête de la banque peut favoriser un meilleur traitement des projets régionaux, en terme de financement et accompagnement technique.
• La banque étant structurant pour les économies nationales, son second mandat pourrait accélérer les initiatives d’intégration économique de la CEMAC.
5. Perspectives & risques
Opportunités
• Mobilisation de ressources pour l’industrialisation, l’intégration régionale et la modernisation infrastructurelle.
• Possibilité de lever plus de capitaux privés (Classe B et C) via des instruments innovants, tout en maintenant le soutien des États (Classe A).
Défis
• Gérer la tension entre modèle de développement et posture commerciale : éviter d’exposer Afreximbank à des crises de dette de ses partenaires.
• Démontrer le statut de créancier prioritaire pour préserver la note de crédit et limiter le risque de restructuration des prêts.
• Maintenir la confiance des investisseurs, notamment étrangers, pour continuer à diversifier les sources de financement.
La nomination de Dr George Elombi marque une étape diplomatique décisive : le Cameroun, et plus largement l’Afrique centrale, se trouvent désormais représentés au sommet d’une institution clé pour le développement du continent. Architecte chevronné de la banque, Elombi a les compétences pour conduire un virage stratégique vers l’industrialisation, avec un renforcement des infrastructures, une mobilisation accrue de capitaux et une diplomatie économique renforcée.
La gestion de l’actionnariat entre soutien étatique, capital privé africain et investissements étrangers sera cruciale pour assurer la croissance, la stabilité et l’impact social d’Afreximbank, tout en préservant sa crédibilité financière à l’échelle internationale.
Alioum Seidou, Correspondant Cameroun

