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La diplomatie, parent pauvre de l’action politique en temps de conflit

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La diplomatie, parent pauvre de l’action politique en temps de conflit

TRIBUNE. Le sommet pour la paix en Suisse a souligné l’importance de la diplomatie pour résoudre les conflits armés, en exhortant à des solutions politiques, malgré la réticence de certains belligérants à négocier. Les solutions militaires ne suffisent jamais à long terme, affirme l’historien Sébastien Boussois*.

À l’image du grand Sommet « pour la paix » qui a eu lieu en Suisse pour l’Ukraine, et qui a enfin mis sur la table l’idée d’un retour en force de la diplomatie face au bruit des armes, il faudra bien que ce chemin soit pris également pour Gaza.

Si les guerres s’éternisent aujourd’hui jusqu’à l’enlisement, la solution politique est toujours pénible à remettre pour autant en selle. À Bürgenstock, dans les Alpes suisses, 90 pays s’étaient donnés rendez-vous dont 50 chefs d’Etat. Volodymir Zelensky lui-même a affirmé qu’il ferait des propositions de paix à la Russie, une fois qu’elles auront été approuvées par la communauté internationale.

C’est un pas décisif qui doit engager Moscou également au plus vite. Mais la Russie n’était pas présente. Il faut trouver les moyens de contraindre ceux qui ne font pour le moment pas le choix de la diplomatie et dans un échange « win win » peuvent y voir aussi leur intérêt à terme. C’est un numéro d’équilibriste mais le multilatéralisme n’avait-il pas pour projet d’équilibrer l’ensemble des relations internationales pour éviter à nouveau le pire sur la planète ?

Il n’y a pas d’autre solution que la solution politique

Car il n’y a pas d’autre solution que la solution politique et il faudra donc trouver les moyens la prochaine fois, au-delà des conditions posées par l’Ukraine, de faire venir la Russie à un prochain Sommet pour la paix. En effet, il n’y a aucun autre choix : on ne fait pas la paix avec ses amis mais avec ses ennemis. Il faudra trouver les moyens de contraindre Moscou d’abandonner, sans passer par une solution humiliante pour les deux parties, une partie de ses prétentions sur l’Ukraine.

Ce n’est pas de l’angélisme ou de la naïveté de prôner cela mais bien de la diplomatie. Zelensky sera-t-il prêt à abandonner une adhésion à l’OTAN ? On a oublié depuis longtemps que ce qui apparaît comme le choix facile qu’est l’option militaire ne mène à rien si dans le même temps la construction diplomatique d’une résolution de crise durable ne s’inscrit pas en filigrane.

Il en va de même pour ce qui se passe à Gaza depuis octobre dernier. Il faut trouver les moyens de faire plier Netanyahou et les dirigeants du Hamas et les amener à la table des négociations jusqu’à ce que paix soit signée. Passé le nombre de morts, la vengeance de Netanyahou face à l’attaque terrible du Hamas sur le sol israélien, la volonté du premier Ministre de rester coûte que coûte au pouvoir pour ne pas perdre la face, il faut pousser pour une solution politique négociée, telle que les médiateurs égyptien et qatari l’ont soutenu depuis le début.

Sous l’impulsion de Anthony Blinken et Joe Biden, le fameux plan américain de début mai dernier, n’est autre que le plan  pour une sortie de crise entre Israéliens et Gazaouis proposé par le directeur de la CIA Burns et le premier ministre Qatari et que le Hamas avait approuvé le 6 mai dernier. Pourquoi ce plan est-il tant soutenu depuis ? Car il n’y en a pas d’autre. Le Qatar est l’intermédiaire incontournable depuis le début de la guerre car il a la main sur les chefs du Hamas à Doha sur demande américaine (et israélienne d’ailleurs) et que le petit Emirat s’est fait une spécialité depuis plusieurs années de la médiation de conflits.

On ne peut pas être perdant à avoir essayé, comme l’Egypte, la discussion plutôt que le combat.

Dans les deux conflits, l’un des belligérants ne voudrait pas négocier

Dans les deux conflits évoqués ici, et qui nous occupent largement depuis plus de deux ans, on a le même perception d’un vrai problème : l’un des belligérants ne voudrait pas négocier. Il est vrai qu’on a connu Poutine plus en phase pour discuter, tout comme Netanyahou. Mais les deux, parce qu’en poste, sont la clé pour en finir avec tous ces drames. Problème : « Bibi » veut en finir avec le Hamas tout comme Poutine veut en finir avec Zelensky. Mais, ce sont aussi ceux qui sont en place à l’instant T et sont les interlocuteurs élus ou pas d’ailleurs. Avec qui d’autre négocier ?

Le problème est que Netanyahou veut sans vouloir une solution politique. La démission récente de son ennemi Benny Gantz du cabinet de guerre est la preuve que le premier Ministre n’a aucun plan pour l’après. Or, une solution diplomatique doit l’inclure : retour de l’intégralité des otages, probable libération de prisonniers palestiniens, retrait des forces israéliennes, force d’interposition internationale à la limite, retour des populations chez elles à Gaza ou ce qu’il en reste, et plus large réflexion sur l’administration globale du territoire.

Et ce devra être la même histoire pour la paix qui suivra entre Russes et Ukrainiens : l’après à court terme, à moyen terme et à long terme. Sinon, on repartira comme en 14 et comme c’est le cas avec la question israélo-palestinienne qui dure depuis plus de 70 ans et dont on a trop longtemps abandonné la reprise d’une solution politique et diplomatique. Il serait bon que le conflit russo-ukrainien ne dure pas autant de décennies.

* Sébastien Boussois est docteur en sciences politiques, chercheur monde arabe et géopolitique, enseignant en relations internationales à l’IHECS (Bruxelles), collaborateur scientifique au Cnam Paris (Équipe Sécurité Défense), au Nordic Center For Conflict Transformation (NCCT Stockholm) et à l’Observatoire stratégique de Genève.

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