LES VRAIS ENJEUX DE LA DIFFUSION DU DRAPEAU DES SÉCESSIONISTES CAMEROUNAIS PAR TV5 MONDE
Lors du match opposant le Cameroun et la Gambie, dans le cadre de la Coupe d’Afrique des Nations en Côte d’Ivoire, le 24 janvier dernier, la chaîne française TV5 Monde a diffusé, à la place du drapeau officiel camerounais celui des sécessionnistes de l’Ambazonie [1]. Ce geste qui pourrait paraître anodin et dû à une erreur, est en fait bien mûri. Pourquoi donc? Ce sont les enjeux
que nous allons mettre en lumière.
1. TV5 MONDE NE POUVAIT PAS SE TROMPER
La chaîne TV5 Monde n’est pas une chaîne qui est née hier. En effet, *c’est le 2 janvier 1984 que TV5 Monde, initialement TV5 fut créée. Son siège est à Paris. Ce sont les audiovisuelles publiques de la Belgique, du Canada, de la France, de la Suisse et l’état de Monaco qui l’ont créé et qui sont les actionnaires* .
*Le gouvernement français, détient la majorité des actions: 46,42%.* [2]
De plus, c’est une chaîne qui est habituée, depuis 40 ans à diffuser la CAN. D’ailleurs la première CAN qu’elle couvrit fut celle en Côte d’Ivoire qui eut lieu du 4 mars au 14 mars 1984, et dont le Cameroun fut vainqueur pour la première fois. En sus, lorsqu’une CAN doit se tenir, le service du sport recueille toutes les informations sur chaque pays qualifié, donc dispose de la liste des 22 sélectionnés, du nom de l’entraîneur, son palmarès. Et surtout des emblèmes du pays: drapeau, hymne national et devise. Pour ce qui concerne le Cameroun, c’était son troisième match. Ce qui signifie que lors des deux premiers matchs du Cameroun, c’est le drapeau officiel qui fut diffusé. Donc, il est impossible que ce soit une erreur. C’est une préméditation voire un plan. N’oublions pas que le 1er septembre 2022, le président français M. Macron avait, indiqué aux ambassadeurs réunis que désormais la France allait utiliser leur ” Réseau Médias Monde” pour combattre le supposée “sentiments anti-français”. Et TV5 Monde en fait partie.[3]
2. LA FRANCE RECONNAÎT CHAQUE FOIS LES SÉCESSIONNISTES EN AFRIQUE
Lors de la rencontre précédemment citée du 1er septembre 2022, le président français, M. Macron avait dit que la France était en Afrique pour défendre ses intérêts. Ce n’est pas un scoup. Cela a toujours été ainsi. Rien n’a changé. Et la France le fait en contradiction avec ce qu’elle affirme et du rôle qu’elle s’est arogée: défendre les droits de l’homme. De manière non exhaustive, nous allons évoquer quelques sécessions en Afrique soutenues par la France.
Le 29 juillet 1966, le coup d’État militaire du colonel Yacubu Gowon mit fin à la concession de la compagnie pétrolière française Elf. ” *À Paris, le général de Gaulle, furieux, refusa d’accepter l’éviction de la compagnie pétrolière française. Il ordonna alors à ses services secrets, qui disposaient d’une importance base au Gabon voisin, d’organiser la défense des intérêts stratégiques français. C’est ainsi que le 30 mai 1967, le gouverneur militaire de la régionde l’Est, le général Ibo Odumegwu Ojukwu, proclama la sécession. (. ..). Au territoire sécessionniste, Ojukwu donna le nom de Biafra. Capitale: Enugu* “[4].
La France soutenu bien évidemment cette sécession, avec l’aide de ses valets africains : Félix Houphouët-Boigny, de Côte d’Ivoire, et Omar Bongo du Gabon. Sous le couvert d’aide humanitaires, la Croix-rouge française va
transporter les armes pour la rébellion sécessionniste. Ainsi apparaît des divergences et le jeune Bernard Kouchner, qui est resté malgré le fait que la Croix-rouge demandait à ses bénévoles de quitter cette zone, un socialiste, créa l’ONG “Médecins Sans Frontières”, en 1971.
En 1982, Laurent Gbagbo, Simone Éhivet (qui épousera Laurent Gbagbo en 1989), Kokora, feux Boga Doudou et Aboudramane Sangaré créent, sous le parti unique, instauré par Houphouët-Boigny avec le soutien de la France, un parti clandestin le Front populaire Ivoirien (FPI). Ce parti révolutionnaire annonça les couleurs dans son programme de gouvernement de mars 1987[5]. Concernant le franc CFA, cette monnaie française imposée à l’Afrique par le général de Gaulle, le FPI avait écrit, à la page 130, ceci: “(…), *la France tente de conserver depuis toujours son influence sur ces États* [ NDLA: les pays utilisant le Franc CFA] *pour conserver ses intérêts économiques et financiers. C’est ce qui explique aujourd’hui encore l’embrigadement par la France de ses alliés au sein de l’institution financière de la zone-franc. (…). Alors dans le processus devant conduire à la réalisation des États-Unis d’Afrique de l’ouest, nous pourrons créer une zone monétaire ouest-africaine autonome et débarrassée de toute tutelle impérialiste.”*
Le FPI, concernant les bases militaires en Afrique et singulièrement en Côte d’Ivoire, nota, dans ce même programme, à la page 189: ” *Le FPI dénonce l’implantation d’une base militaire française (43e BIMA) sur le territoire Ivoirien. Par conséquent, il prend l’engagement de déployer tous les efforts afin de procéder au démantèlement de cette base implantée en vertu de traités inégaux et maintenue contre la volonté du peuple Ivoirien. Nous rejetons également les alliances militaires qui ne sont pas porteuses d’émancipation et de progrès nationaux* . “. En octobre 2002, le candidat du FPI, Laurent Gbagbo devient, à la suite d’élections présidentielles, organisées par les militaires , avec le général Guéi Robert comme chef de l’État Ivoirien. La France et ses affidés Africains (Blaise compaoré du Burkina Faso, Abdoulaye Wade du Sénégal et Omar Bongo du Gabon) un coup d’État. Ayant échoué, la France le transforme en une rébellion dirigée par un jeune étudiant qui n’avait même pas fini ses études : Guillaume K. Soro. Les dirigeants français sollicités dans le cadre des accords de coopération militaires vont refuser. Cependant, l’armée française va s’interposer entre les forces armées nationales Ivoiriennes et les rebelles, créant ainsi la partition de la Côte d’Ivoire en deux. Et ce n’est que le 11 avril 2011, après le coup d’État qui installa leur homme à la tête de la Côte d’Ivoire, M. Alassane Dramane Ouattara [6], que l’armée française regagna ses bases.
Dernier exemple, concerne le Mali. Alors qu’il y a au moins 4 voire 5 fois plus de Touarêg au Niger, la France prendra fait et cause pour celle du Mali. Il faut préciser que les autorités nigérennes d’alors était sous la domination de l’impérialisme français. En effet, c’est, par exemple, l’uranium de ce pays dont se servait la France, depuis 1959, pour non seulement ses 58 centrales nucléaires, mais également pour le vendre aux autres pays européens. La France décida de créer une sécession, au nord du Mali avec comme allié un mouvement rebelle et terroriste, baptisé mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). ” *En debut 2011, une délégation du MNLA avait été reçu discrètement au Quaid d’Orsay, Et le 7 février 2011, au Sénat, Alain Juppé (…) avait appelé les sénateurs français à traiter la question touareg sur le fond* .” [7].
Le 6 avril 2013, ce sont les médias français qui diffusent la déclaration d’indépendance, pour ne pas dire de séssion, du MNLA. Et d’ailleurs, lorsque la France va s’auto-inviter au Mali, elle empêchera l’armée malienne d’entrer à Kidal, fief et capitale de la république du touareg du Mali. Heureusement, depuis le 14 novembre 2023, les nouvelles autorités du Mali, patriotes et panafricains ont mis fin à cette escroquerie.
3. LA HAINE CONTRE LES PANAFRICAINS CAMEROUNAIS
Le Cameroun a toujours été (et le demeure encore) une terre dont les filles et les fils se sont opposés à tout impérialisme, notamment français. L’union des peuples Camerounais (UPC), un parti panafricain et patriotique, créé le 10 avril 1948 par des patriotes Camerounais pour demander l’indépendance du pays fut combattu. Dissous en mars 1955 par les “autorités colonialistes françaises”, l’UPC fut exclu du RDA par Houphouët-Boigny le 9 juillet 1955. Ses leaders dans l’ordre respectifs: Um Nyobe, Félix Moumié et Ernest Ouandié ont été assassinés par les services secrets français. Le premier eut une mort semblable à celle de Lumumba. En effet, le 13 septembre1958, Um Nyobè est exécuté par l’armée française au Cameroun. Non content de , cela ” le cadavre d’Um Nyobè sera traîné au sol, exhibé en public, photographié puis enterré sous une chape de béton.”[8].
La région de Sanaga- Maritime fut le théâtre d’un génocide, en 1958. Un silence forcé est demandé aux médias français. Mais on peut tuer des leaders mais pas leurs idées comme le disait Thomas Sankara. Et depuis fin 2012, plusieurs chaînes de médias panafricains se sont installés. D’abord, Afrique Média, ensuite FOR YOU MÉDIA et Panafricain Média. Sur ces médias, des bénévoles, tels le président BANDA Kani, Parfait N’DOM, Me Momo, Jonathan BATEGUENÉ, Dr. Yam TIMBA, D’AVARICE, Bertrand BATINDA, professeur M’BELEC, Charly KENET, Anatole AHIZI, Patrick SAPACK, etc. ont mis à nu le jeu trouble de la France en Afrique. Ils ont accompagné les processus panafricains dans les pays de L’AES. Outre ceux-ci, il y a Nathalie Yamb, de père Camerounais et le professeur Franklin Niamsi, qui sont étiquettés, avec Kemi Séba , les supposés hommes de Poutine. De ce fait, une haine viscérale est vouée à ce pays dont le président refuse de fermer ces médias malgré les injonctions de Paris. Alors la France reconnaît la rébellion sécessionniste de l’Ambazonie, comme nous l’avons indiqué ci-dessus.
4. POUR PARER À L’ATTAQUE CONTRE L’AES
Les 29 et 30 juillet 2022, le premier ministre espagnol avait indiqué que l’OTAN pourrait intervenir au Mali si ses intérêts étaient menacés. Depuis la naissance de l’alliance des États du Sahel (AES), le 16 septembre 2023 dernier, l’OTAN pense ses intérêts sont menacés. Et de ce fait, prétextant le retour de l’ancien président nigéren, tout est mis en œuvre pour convoyer et du matériel et des agents secrets dans les pays dont les chefs de l’état sont aux ordres: Alassane Dramane Ouattara, Tinubu, Patrick Talon, Idris Kaka Débi, Nanan ADO. Le Cameroun ayant refusé d’accueillir les légionnaires sans domicile fixe français, chassés du Mali, puis du Niger, se trouve dans le collimateur de l’OTAN et des services secrets français. Voilà un motif de plus.
La diffusion du drapeau, par TV5 Monde le 24 janvier 2024 dernier, de la sécession rebelle Camerounaise ne fut pas un acte involontaire. Il s’inscrit dans la guerre de procuration que l’occident compte mener en Afrique pour soi disant contrer l’influence russe et chinoise. C’est pourquoi, nous devrions rester vigilants et considérer ce fait comme acte de guerre. Car la France, à l’instar des autres pays occidentaux, a toujours privilégié ses intérêts au détriment de celui des Africains. Il ne faut jamais l’oublier. C’EST DE NOTRE SOUS-DÉVELOPPEMENT QUE L’OCCIDENT S’EST TOUJOURS DÉVELOPPÉ. Rien n’a changé.
L’HISTOIRE EST LE TRIBUNAL DES PEUPLES.
Fait, le 28/01/2024
Par Tapé GROUBERA
Tapé GROUBERA, Président du Mouvement pour la Renaissance de l’Afrique (moraf)
Mail: moraf.afrique@gmail.com
*RÉFÉRENCES*
[4]: Jean Ziegler, La haine de l’occident, Alain Michel, 2008, pp. 152-153.
[5]Propositions pour gouverner la Côte d’Ivoire 1, L’harmattan, 1987.
[6] Nathalie Schuck et Frédéric Gerschel, Ça reste entre nous, hein?Deux ans de confidences de Nicolas Sarkozy, Flammarion, 2014, p.102.
[7] Canard enchaîné N°4764 du 15 février 2012.
[8] Thomas Deltombe, Manuel Domergue et Jacob Tatista, La guerre du Cameroun. L’invention de la Françafrique, La Découverte, Paris, 2016, p.125.